janvier 10, 2007

Jah Klacan, un redresseur de tore (2)


De quoi d'autre pourrait-elle bien s'enorgueillir, la France ? De quelle autre fierté que le fromage ? Voici la seule grandeur que puissions reconnaître au pays de France : le fromage. Moi-même tel que parlons, me considérons de telle matière : fromage en voie de se faire, encore ignoré du répertoire, encore indéfini et pas du bataillon, pâte en affinage en somme, mais déjà fromage. Charles de Gaulle, se demandant "comment gouverner un pays où il existe trois cent soixante cinq variétés de fromage ?", jamais ne s'est vu lui-même en tant qu'un fromage. En tout cas ouvertement. Pourtant ce bon françois n'estoit pas fait d'autre manière, et la pâte du général avait-elle d'autre allure que fromagère ?


Le fromage c'est moi, la France c'est moi ! En colère, sommes fromage de colère ! Car si sommes nés des bouts émiettés de quelque tête, comme il est vrai, si sommes nés de parlante tête, déjà bien nourrie de fromage autant que de langage, il n'est pas moins vrai que j'aspirons moi-même à la fromagéité, une fromagéité pleine et entière.

Moi, c'est-à-dire Jah Klacan, sachions dès le premier cri que naissions de cette sorte, étant imaginé et formulé par certaine tête parlante, grosse comme elle fut, et toute pleine de bruites et de symboles des diverses choses du monde, qu'elle m'enfanta par voie de langage, oui cela le savons, que sommes fils de caboche, et caboche toute bourrée de bouts de choses disparates appelés mots et formant langage, qui nous a fait naistre par voie de bouche, par où passe langage et fromage. Si voici donc cette gueule crânienne dont sommes fruits, toute bricolante de choses de bouches, toute frémissante de la langue et jouissant de sa propre fromagéité, alors il est juste qu'à mon tour aussi j'aspirons à ça : une pleine et entière fromagéité.

Et toi mon bougre, où est ta fromagéité ? En jouis-tu ? Tes colères, en as-tu tracé toute la carte entière ? En as-tu déplié toute la poche ? As-tu traversé tous les états d'fromagéité, toutes les strates du gruyère de la meule langagière ? As-tu fromagé l’phrasé dans l’épaisseur ? As-tu arpenté ses toises, as-tu toisé ses arpents, as-tu fondé l'idiome qui serait verbance d'un acte en langue de france, garant de fromagéité ? As-tu bâti la yourte ? As-tu yourté la langue ?
Car dans le fond qu'est ce que soyons, sinon yourte en langue ? Cette chose moulée dans mon fromage, formée dans mon langage, fromagée dans ma parole !

Qu'les mots rampent et que les fruits croissent,
et que les fruits tombent, comme tombe le silence !
Que les mots rampent doucement sous les fruits suspendus,
leurs ventres unis à la terre muette !

janvier 06, 2007

Jah Klacan, un redresseur de tore (1)


Dans le monde-poche, qui marine de haine et d'mépris, une colère doit sortir. Une colère doit voir le jour, et bien plus qu'une, moult colères, saines et légitimes colères !
Pleine est la coupe ! Et nos colères verront l'jour ! Toutes sont là, qu'attendions dans nostre bouche ! Bestioles colères, créoles colères, hargnes arabes, rages du jura... Sûr nos mots-colères, vite on les accuserait de bruites barbares, ou de manières de beste !


Barbarie, bestialité, que signifient, que recouvrons de ces pauvres termes, de quelle sâle besogne nous les chargeons ? Ceci l'exigerons, qu'on cesse de nommer telle la saligoterie générale du monde-poche, que cessons l'hypocrisie, qui use des pauvres mots comme barbarie ou bestialité, ou toute autre inadéquate chose, pour désigner des crimes civilisés, les faire passer pour quelque outrance barbare ou pour équivalence animale !
Devons dire que telles saletés sont fruits bouseux de bien raisonnable monstruosité, nés de très civilisée logique saligote, et de toute ces mauvaises sophistications, qui font coller la saleté morale en tout point de la fausse civilisation !
Quand intelligence, raison, ordre et techniques, servent buts si salopardement conçus, que les salopards objectifs peuvent être si courtoisement racontés, en mots si bien définis, clairs, distincts, et politiquement tolérés, alors, que cessons d'insulter bestes et barbarie, que cessons de les en charger, par ces mots qui les représentent dans le langage policé de nostre fier pays, que cessons de les faire assumer tout crime d'homme qui se dit bien civilisé, tout crime de civilisation, grande ou petite, ou tout crime de tel ex-empire de nain comme celui de France, qui se fait passer pour fine fleur de l'humain et crème du vivant !

Tous les mots, qu'ils rampent !
Qu'les mots rampent et gouttent aux routes,
aux stries du territoire-bouillon...
Et que les fruits croissent, et qu'ils tombent,
comme le silence tombe, un silence plein de haine !
Les mots qu'ils rampent
doucement sous les fruits en suspens,
leurs ventres unis à la terre muette !